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La mort du prince (1984)
Argument :
Argument de la pièce.
Une contrée est en proie
aux plus grands malheurs : famine, sécheresse et pauvreté
y règnent. Les raisons de ces souffrances sont liées
d'après les augures de la Prêtresse à la naissance
du Prince. Qu'il vienne à disparaître, et le royaume
retrouvera richesse et prospérité.
Le Roi est un homme de coeur. Il ne peut admettre qu'après
avoir perdu son épouse lors de l'accouchement il doive
favoriser la Mort de son fils afin d'obéir aux augures.
Il tentera par un stratagème de substituer
son enfant à un autre, stratagème qui échouera.
Extrait :
SCENE PREMIERE
Première, deuxième
et troisième nourrice
PREMIERE NOURRICE
Il semble si pur
qu'il pourrait obtenir le royaume des rêves, il paraît
d'or. On le dirait venir d'un autre monde.
DEUXIEME NOURRICE
Observez la douceur tiède
de son visage ! Mais regardez cette beauté vierge !
TROISIEME NOURRICE
Il y a peut-être un monstre
de haine qui cache derrière son ombre d'amour des pensées
perverses, des idées acerbes. Il y a peut-être une
force inconnue. Nul ne sait, nul ne pourrait savoir. Il faudrait
le secouer, le réveiller dans sa parfaite quiétude.
Ainsi nous serions certaines de connaître la vérité.
PREMIERE NOURRICE
Surtout, de grâce, ne
vous y essayez jamais ! La punition se transformerait en supplice,
et nous en pâtirions dans les plus grandes souffrances.
DEUXIEME NOURRICE
Nous aurions dû nous
taire, et non pas exprimer ces propos. Il va bailler, déjà
il s'étire. Il se tourne, se retourne. Il plonge à
nouveau dans son sommeil.
TROISIEME NOURRICE
Il dort peut-être et
rêve de ces exploits de tortures, de ces expériences
d'horreur. Il rêve qu'il jouit à accomplir le Mal,
à posséder la chair vicieuse. Que pense son esprit
derrière sa face juvénile ? Que lit-il dans ses
yeux bleus, des images de mort, des figures de crime ignoble ?
PREMIERE NOURRICE
Cesserez-vous
enfin avec vos suppositions, avec vos supposées capacités
à penser bêtement ? Prétendez-vous toujours
extraire le savoir sans jugement certain, sans connaissance réelle
de la "chose " ?
DEUXIEME NOURRICE
C'est que justement
de la "chose", on en dit beaucoup de Mal. On n'en dit que du Mal.
Ce ne sont pas de simples nourrices justes bonnes à presser
leurs tétines qui auraient pu inventer de telle absurdités.
...
La pute (1986)
Notice :
AVERTISSEMENT
Je pense qu'il sera fort aisé
à ceux et à celles qui liront ces lignes de comprendre
au premier degré le sens exact des phrases qui sont hélas
exprimées. Je me suis noyé dans la fange, et je
n'ai pas hésité à user du plus vulgaire afin
d'exprimer l'horreur monstrueuse dans laquelle était soumise
la prostituée. On me pardonnera, je n'en doute pas, les
termes abjects utilisés.
Il existe aujourd'hui en France
un esclavage, le plus ignoble de notre civilisation. Il consiste
à soumettre la femme non pas à l'identité
de femelle reproductrice, mais à celle de trous béants.
Je m'insurge contre cette ignominie. Je me contente d'une plume
afin d'exprimer mon désarroi, car je ne puis agir différemment
ne possédant pas les moyens et les mesures appropriés
pour chasser ce fléau.
Extrait :
I
Bélinda
est assise sur le lit. Elle est fortement dévêtue.
Ses mains cachent son visage. Des larmes coulent le long de ses
yeux. Elle entend sonner à la porte. Prestement elle s'essuie,
se dirige vers le miroir, tape l'oreiller, donne un semblant d'ordre
dans la chambre. Trente secondes s'écoulent.
Bélinda
Voilà,
j'arrive. Attendez un instant.
Elle ouvre
la porte. Feint à l'étonnement.
Bélinda
Je m'en serais
douté. J'ai reconnu à ta façon que c'était
toi.
Le client
Drôle
de façon de me recevoir.
Il tente
de l'embrasser sur la bouche. Elle esquisse son mouvement.
Bélinda
Bon alors, c'est
comme à l'habitude. Un coup par devant, un coup par derrière.
Tu sais, mon amour qu'il faut penser à ta toilette.
La scène
devient ombre. On ne peut discerner les personnages. Dans un petit
réduit, on doit imaginer ou supposer avec les yeux d'un
voyeur Bélinda s'occuper du client, lui laver dans le lavabo
le sexe. Il se tient raide et ne dit mot. Elle l'entraîne
sur le lit. Son comportement est passif. Le coït dure peu
de temps. Elle le reçoit dans le vagin, puis se retourne.
Il éjacule dans l'anus. Il expulse en râlant. Puis,
se rhabille hâtivement et nerveusement.
...
Camille et Lucille (1985)
Avertissement :
Il s'agit ici de poser le problème
du célibat des prêtres. Un long dialogue s'installe
entre une jeune mariée qui ne peut accomplir l'acte sexuel
avec son époux et un prêtre qui tente de la convaincre
d'honorer le devoir conjugal. Mais une sorte de passion violente
à la limite du viol va unir ces deux êtres.
Le lecteur est laissé dans l'expectative
du doute, - il ne sait si la jeune fille était faussement
consentente ou si elle a subi un viol commis par un prêtre.
Cette ambiguïté questionne sur la nécessité
ou non pour l'Eglise de permettre à ses prêtres d'avoir
une compagne.
Extrait :
CAMILLE
Quel privilège
tirez-vous de cette blancheur, de cet interdit à refuser
l’effet de nature ?
LUCILLE
Mais quelle
satisfaction obtiendrais-je avec cette bouche vaginale, avec ce
sexe qui n’est pas perforé ?
CAMILLE
Votre conscience
primaire désobéit à l’ordre de Dieu : la
chair doit s’unir à la chair. Votre moi intime se révolte
contre votre corps qui a été conçu par le
Plus Puissant. Pourquoi se complaire du sacrilège ? Et
pourquoi déplaire à notre Extrême ?
LUCILLE
Par-delà
cette nécessité d’entrouvrir ces cuisses, par-delà
cette obligation de donner une fleur pure et fragile à
mon inconnu, car cet homme est un inconnu, je dois confesser que
je n’étais pas apte à accomplir ce coït physique,
ce stoïque acte abrupte : je suis née vierge, il me
faut mourir ainsi.
...
L’huile fraîche (1978)
Contenu : Recueil de
textes en vers et pages en prose .
Extraits :
Rien ne
détruira
Rien ne détruira les
frayeurs promises à son front si clair. Ni souffle ni violence
n'épancheront de fièvres froides les douleurs de
ses plaintes.
Il vit solitaire et immortel, caché dans
sa retraite au fond des bois. Il dort d'un sommeil paisible ou
contemple la nuit les grands champs alentours.
Recensez la sagesse de son cœur ! Embrassez
son calme mortuaire ! Ce sont ces bouches qui vous parlent, écoutez-le
!
On se joue de lui pour un écrin de perles
? Qu'importe ! Personne n'admirera le diadème qui l'habite.
Son secret divinement gardé sera seulement dévoilé
au maître des lieux.
A ma
dormeuse
Je ne veux pas ce soir, licencieuse ennemie,
Respirer en ton corps le doux parfum des songes,
Ni déplacer mon coeur sur tes seins endurcis,
Ni la jouissance facile où parfois tu me plonges.
J'espère sur cette bouche inventer un amour
Puissant et immortel que tu composeras,
Redorer cette nuit jusqu'aux lueurs du jour
Dans la chambre lugubre offerte à nos ébats
!
Qu'importe, les espoirs de nos mains en détresse,
Le souffle accéléré que réchauffaient
nos yeux !
Je demande plus fort que houle et que tendresse,
Un bonheur sans silence pour l'esprit ingénieux.
Car de son pur cristal où le génie descend
Rêvent de vrais soupirs qu'avait soufflé l'enfant.
...
Le germe et la semence (1978)
Contenu : Recueil de
textes en vers et de pages en prose.
Extraits :
Soupir ancien
D'un soupir ancien naît l'indifférente
gloire
Qui éclaire de l'ennui le plus pur diadème
D'hier. (On prétendrait mourir en ma mémoire
Un or épais et ocre dispendieux à l'extrême
...)
Fustigé à l'écart, éloigné
des disciples,
Je l'entends battre inexorablement en moi ! ...
Vaste écrin d'amertume aux facettes multiples,
Il fuit, meurt avorté sans l'ombre d'un émoi
! ...
Mais que demain traînant son horrible fardeau,
Pour l'éveil purifié resplendisse son nom !
Peut-être testament au bas autel des maux ...
O le soleil de chair contemplant un vain drame,
Idole de toi-même marqué à l'unisson,
Seras-tu des substances faire couler une larme ?
Je veux te dédier
Je veux te dédier, chatoyante
parure, sur des coussins bercés par le luxe et l'encens,
cet hymne solennel bordé de sa froidure, et promis aux
secousses vengeresses du Néant.
Alors je te convie entre ces quatre murs, au
sublime festin de l'inconnu malheur, et je prépare, cynique,
une noble mixture qui brûlera ta peau et percera ton coeur.
Et quand, momie étrange et desséchée,
sur un plateau superbe, je te poserai nue, tu vibreras encore
de spasmes saccadés, admirable beauté que j'aime
et que je tue !
...
Le Moût et le Froment (1979)
Contenu : Recueil essentiellement
composé de pages en prose
accompagné de quelques textes en vers.
Extraits :
Fraîcheurs
spirituelles
Fraîcheurs
spirituelles qui vagabondent à l'orée des moissons,
envolées légères qui s'élèvent
vers les cieux cristallins ! Jeune homme aux épaules solides,
va et porte tes fruits sur les terres purifiées. Laisse
l'insouciance et la rancune sur le seuil de ta porte. Là-bas
les routes courbées et cahotantes déambulent. Mais
l'effroi et la crainte unis et passionnés te font languir.
Je te préviens, ton orgueil
doit me suivre. Moi, j'obscurcis tes secrets, je conjugue l'inertie,
la force de tes vingt ans ! C'est le devoir aujourd'hui maudit,
le bonheur de demain ! Toutes les voix de la délivrance
mystifient le Temple court des repentirs. Toutes les traces des
confrères sont à oublier. Il ne reste qu'une femme
sensible qui indique la route à suivre ...
... Sueurs qui
transpirent déjà par mes veines ! Et meurtres de
l'enfance que j'ai abandonnés ! Eterniser son malheur est
raison du pauvre ! La magnifique satisfaction de l'enjeu ! ho
! l'immense succès que le temps saura apprécier
!
Les lourdes
terres s'impatientent. Il faut aller.
Ainsi ai-je vu
Ainsi ai-je
vu de lourds chevaux traîner de superbes cohortes de sel.
C'était au sortir du rêve. Oisive, entretenue par
la fatigue du matin, l'imagination jouit, reine du lieu de la
chambre. Elle conduit le repos jusqu'aux portes de l'inconnu.
Encore du drôle peuplé de romantisme, des croissants
de bonheurs comme des étapes successives. Elle égrène
sa course puisque le sommeil gagne et condamne les premières
heures du levée ! Quand je distribue les rôles de
chacun, par de mesquines allusions, je les sais composer l'image
sacrée et transformer à leur goût les règles
de mon propre jeu.
Silence, distorsions
comme des cambrures sur de planes figures, puis des mouvements
cycliques dans des bourrasques d'eaux pleines : elle se plaît
avec l'impossible, rit de ses nombreuses découvertes. Amie
de l'absolu, du négatif, femme ou démoniaque Circé,
qui est-elle ?
...
Collages (1980) :
Contenu : Textes en vers
et pièces poétiques courtes en prose.
Extraits :
Un désir
de changer
Un désir
de changer d'existence secoua mon âme tout à coup.
"Mon coeur, mon cher coeur défunt
ne rêves-tu point à l'oubli et à la paresse
? Ne veux-tu pas noyer le chagrin qui t'obsède et t'éloigner,
partir, fuir ? Regagner d'autres terres où ton corps travaillé
par la vermine trouvera refuge ? Il te faut la langueur, la mollesse
des îles enivrantes parfumées de musc et de rêves
des tropiques.
Oui, je crois voir une forêt
de mâts baignée par la pureté bleue de l'Azur.
Et j'entends déjà les chants lugubres des esclaves
nègres, ivres de liberté, réconfortés
par quelques bouteilles de rhum !
Comme tout ceci est beau et
prenant mon coeur ! La houle berce mélodieusement ton corps
et chasse l'ennui !"
Peut-être que le rêve
et l'oubli m'éloignent de la triste réalité
où mon âme s'était mise.
Oui, aux
portes des cieux
Oui, aux portes des cieux baignés d'anges
étranges
Où se mêle l'abandon, se pense un rêve qui
change.
Dans le mouvement imperceptible des nuits,
Cette angoisse morose est l'ennui de tes craintes,
Et son effroi stérile, puissant et infini
S'élève jusqu'à l'aurore imprégné
de contraintes.
O soupirs vainement soufflés par mon orgueil !
O la lumière torve des derniers sacrements !
La racine interdite jette la feuille qu'elle ceuille,
Absence de blanche sève distribuée au temps.
Mais un délire encore m'arrache à mon sommeil.
je veux par l'alchimie l'impérieux effort,
Et je renais d'or pur vers de faibles merveilles.
Mon âme est consumée et sa raison s'endort !
Et l'espace agrandi en rimes de rumeur
Offre l'objet stupide, tintamarre sans éclat,
Au maître de mes lieux sans pitié pour son coeur,
Pourtant reconnaissant d'un quelconque débat !
...
Souffles nouveaux I (1992)
Contenu : Recueil de
textes en vers mêlé de pages en prose.
Extraits :
O toi qui
plonges
O toi qui plonges dans le lourd
sommeil sans images, conçois quelque peu par cette substance
autre ...
Tu m’es espoir par la pureté du Oint
et sur l’onde inventive, tu oscilles ou tu penses y découvrir
le futur d’un secret.
Ou mieux, tu es le souffle gonflé d’idées
sereines, l’algèbre complexe d’un exilir à découvrir,
à déceler là au plus loin, au plus proche
pourtant de la raison diffuse.
Tu m’es l’approche insoupçonnée,
la brise d’aile légère dans le battement envolé,
et je dois te saisir, ombre belle d’idée fraîche
comme une femme imagée.
Ou lentement tu descends les marches pour caresser
le pur miroir d’eau fugitive, Princesse chaste aux pieds rêvés.
Et je dois te capturer dans la transparence
de ma pensée, quand à peine saisie, tu m’as échappée.
Et je dois te concevoir dans la claire essence
d’un concept supérieur ...
Folie ! Audace ! Oser te comparer de la sorte
à la femme, toi mon principe d’élévation,
toi ma spéculation de l’esprit !
...
Messages I (1994) :
Contenu : Recueil de
textes en prose mêlé de fragments en vers.
Extraits :
L'homme
s'exhale
L'homme s'exhale
inexorablement.
L'homme dont la recherche interne est de comprendre.
Il se nourrit d'autrui, s'instruit de l'inconnu et tente par l'alchimique
effort de réduire, d'étendre, d'élever.
L'homme qui use de prémonitions, d'avenirs
proches, se plonge dans le passé, et se construit de l'intérieur.
Aux uns, l'insignifiance de la poésie.
Aux autres la sublimation du verbe.
Offrir cette création, orienter la lumière,
pour qui ?
Nous tentons stupidement de plaire, mais la
clé de la métaphore est seulement accessible à
l'élite.
Nous superposons des dimensions et des espaces les uns sur les
autres, nous franchissons des portes au-delà de l'audace
et pénétrons dans l'invisible. Mais qui pour nous
suivre ?
Tu dors
Tu dors dans une forêt de feu. La mer
lèche ses lèvres humides, la mer de topaze scintille
au firmament de la nuit. Lorsque tes yeux s'envolent, les nuages
bondissent et construisent d'étonnantes figures.
Contre ta hanche, la fille supplie. Il y a autour
de ta personne des lances étincelantes, des bijoux de chairs
blondes. Il y a de la fumée aussi qui regagne les nuages.
Tu habites donc cette forêt de feu. Il
y a des regards braqués qui pénètrent ton
corps, et leurs aiguilles invisibles te font abominablement souffrir.
Un seul chemin mène à ta chaumière.
Il faut passer par le toit. Et toujours la même question
lancinante frappe ta voûte étoilée : "Pourquoi
? Pourquoi ?"
Il y a des couteaux. Qui est hache ? Tout prédispose
à ton innocence. Et cette affreuse coupe que l'ont te fait
boire à petites gorgées, la refuseras-tu, ô
Christ de l'inconnu ?
Dans ton lieu interdit, tu décides du
poème. Ta méthode est certaine. Elle permet d'accéder
à la meilleure des places. Tu es en clarté. Oui,
produis jusqu'au dernier jour.
...
Messages II (1994) :
Contenu : Vers mêlés
à de la prose - Textes en prose.
Extraits :
Parler avec soi-même
Par la fente on observe
L'instantané passer
Comme des particules en suspension
Dans un rai de lumière.
Il y a l'imperceptible presque,
L'inaudible, l'improbable et le doute
Qui s'entrecroisent, se juxtaposent
Et tentent de cohabiter.
Au-dedans, il y a des sortes de tentacules
Légères, invisibles et silencieuses.
Elles prélèvent délicatement les propositions
offertes.
A l'extrémité de leurs doigts sont des yeux
D'une acuité visuelle extrême,
Ils touchent, voient et palpent,
refusent ou prennent.
A quelles raisons, décident-ils ces doigts ?
Qui ponctionne, qui retire ou exploite ?
A l'extérieur, on peut supposer
Qu'il y a un front, sorte de muraille,
D'épaisse Carcassonne. Mais dedans ?
Là des idées changent de formes
Sont acheminées, transmises
Par un dialogue intérieur,
Par une activité électrique encore inconnue.
D'autres d'espèce chimique
S'évaporent, disparaissent pour s'associer ailleurs.
C'est donc échos, lumière déversée,
Brassages d'images, fluidité de désirs,
Maîtrise temporelle, échappée de seconde
Segments, fragments de bouts, de propositions,
Associations contrôlées, libérées.
L'esprit extrait des mots, des groupements.
Qui fusionne, qui combine ?
Les ressemblances épousent l'analogie
Et le contraire se juxtapose rapidement.
Le mensonge tire son origine de la vérité,
La vérité tend vers la sagesse poétique.
Parler longtemps avec soi mène à
quelque chose.
La beauté d'Hélène
Je voltigeais dans le souffle
de l'air, refusant la station, ignorant le refuge où se
concevait la femme. Des tourbillons épars portaient dans
leur poussière la chevelure royale d'Hélène.
Sa beauté s'imprégnait d'idéale de roses.
Sa silhouette impossible allait boire aux fontaines.
La brume neigeuse enveloppait son corps dans
la transparence inouïe de lumière messianique. Je
m'évanouis puis m'éloignais de cette persévérance
sphérique, sublimation de son image charnelle.
...
Résonances I (1998)
Contenu : Fragments poétiques
essentiellement en vers libres.
Extraits :
Qui seras-tu
Qui seras-tu tu ne sauras pas qui j’étais
Je t’ai connu très peu produis-moi !
Par ces lignes, pareilles aux lignes de X
Que la main s’active dans le jour, dans la nuit
Par-delà l’impossible à atteindre, à
transmettre
Niant les mamelons, le pubis, les pieds des femmes
Cherchant un sacre aléatoire, dérisoire, nombriliste
Ton front large, vide, chargé de livres
Et l’axe de ton sexe, limite tendue
La femme est abstraite, irréelle, jambes longues,
Ta bouche prophétique murmure quelques airs
Virgiliens, Davidiques, Saloniques
Vers moi, je descends, plonge,
Les Dieux toujours devant mes yeux,
Je remonte pour y tirer de l’ancien
Corde et puits, - plus tu lui prends, plus il est grand -
Malgré moi, conscient du rien, j’insiste.
Pour peu de sexe peut-être
Mon jour s’enfonce dans ta nuit
D’épiderme, de rides, mascaras, chevelure,
Nous échangeons nos souffles
Je me transfuge en toi.
Yeats - translate
I
Non, ceci n’est pas une contrée pour
hommes âgés, les jeunes, dans les bras l’un l’autre,
les oiseaux dans les arbres - ces profusions d’effluves - et leur
chant - les repères des saumons, les maquereaux en foule
dans la mer, tout ce qui est poisson, ou plume célèbre
tout au long de l’été ce qui va concevoir, naître
et mourir.
Emportée dans cette musique sensuelle,
toute vie rejette les mouvements de la fluide intelligence.
II
Un homme qui a vieilli est bien pauvre chose,
des lambeaux de guenilles sur un maigre bâton à moins
que son esprit ne s’enthousiasme et ne chante toujours plus fort
à chaque nouvelle écharde de son manteau de mort.
Pourtant, il n’est pour le chant qu’une école,
celle qui consiste à étudier les moments où
l’âme resplendit de sa propre magnificence.
Voilà pourquoi, je suis allé au-delà
des mers pour atteindre la Sainte Cité de Byzance.
...
Résonances II (1998)
Contenu : Recueil dans
la lignée de Résonances I
Extraits :
Visage
Visage lait de femme
paysage de beauté
quiétude et plaisir de l’oeil
Stabilité et raison
bien-être
O certitude de paix
Toi, en vérité
Des mots
Des mots secrets et interdits
cachés au plus profond de l’être
Guérissons-nous de nos souffrances ?
Dans les plis de la certitude
l’union s’impose
nous espérons sans réel avenir
Par où
Mots,
Par où la pensée pleure :
l’homme - le reflet - la nudité
la surprise - je veux, je cherche, origine
le propice, le souhaitable, le médiocre,
le Moi, encore - écrire.
Le geste d’éclairer
Ce fut le geste
d’éclairer : réel serviteur incompris de la masse.
La torche s’élevait royale au milieu d’eux. Que comprirent-ils
? Que purent-ils intégrer ?
Les lointains, les passants,
Ici au plus profond du puits
...
Suites et Relances I (1999)
Contenu : Recueil récent
de pièces courtes et modernes.
Extraits :
I
Dans le silence qui inspire
pour éprouver, pour épouser de nouvelles formes
des fuites comme des éclairs,
des fluides qui circulent
Il suppose encore des possibilités,
des aptitudes - il suppose
Pour oublier le vieillissement, ou quémander
une part d’immortalité :
passer ou être demain ?
Il aurait voulu être aimé dans la vérité
chronologique - pour aujourd’hui et le futur aussi.
II
La bouche se nourrit d’extase, de substances
claires,
un souffle encore dans les draps de l’amertume,
le miel de ton poème, - c’est ça : imagine
hors du tragique dans le possible
avec audace toutefois
appelle ça la passion,
on rira bien !
III
Subtils effets autres empruntés, exploités,
volés, permis ?
mélanges, variantes, prendre, extraire, tirer
Patrice Delbourg écrit : alchimie et plagiat entre
le blanc et la blessure
Moi, je dois dépasser ma limite,
absence de repaires
et l’écho constant en vérité éternelle
d’ennui et d’inutilités.
Quelle grandeur ? - sentiment de petitesse
et crainte d’être en retard.
...
Suites et Relances II (1999)
Contenu : Eléments
poétiques supplémentaires accompagnant le premier
recueil.
Extraits :
Paysages effilés,
filants, fuyants
Dans le lointain
le mouvement circulaire
Les horizons bancals,
Les arbres nains
pour l'œil inventif
Le ciel est créateur de choses nouvelles
*
Déclinations fixations et vertiges
Fuites obscures dans un sexe sanglant
Dans un triangle de soupirs
nourri de gémissements
et de plaintes heureuses
haut lieu qui hante l'orgasme
l'expulsion sacrée
i veut y demeurer
pour une ébauche d'éternité
croyant sans doute que ses petits
éclatements de micro-jouissance
rendent la vie somptueuse
Que la luxure dans une chair rousse
idéalise le temporel pour le rendre invariant
*
J'entends des musiques criardes
agressives et tendues
fibres de chevelures prêtes à casser
de chevaux qui hennissent de plaisir
et des soupirs de jeunes filles en orgasmes
envolées dans les tourbillons du vent
Des concordances étonnantes
entre sécrétions mielleuses
de femmes gémissantes
et guitares électriques
toi, mon amour nue,
tendue à l'extrême
quémandant l'explosion impossible
...
Textes érotiques (1978 à 1996)
Contenu : Florilège
des pièces légères ou amoureuses.
Extraits :
La femme
insecte
Je sortis de
mon cauchemar, couvert de sueurs glacées, j’allumais rapidement
la lampe de chevet et vis, face à moi, à quelques
mètres du lit cette étonnante fille cruelle avec
des ailes de papillon qui m’observait dans une fixité étrange.
Les ailes commençaient à tournoyer dans une sorte
de ballet bizarre, difficile à décrire. La lumière
jaunissante de la pièce éclairait çà
et là dans un jeu d’ombre la femme-insecte venue pur me
faire jouir ou souffrir. Je bondis hors du lit, nu, en érection
et m’approchais d’elle. Ma respiration était saccadée,
j’étais pantelant, frémissant et angoissé,
mais attiré irrésistiblement par cette curieuse
femelle. De son regard métal, elle m’obligea à m’agenouiller.
J’obéis lentement et plongeait mon visage contre son buisson
noir et brillant. Je buvais crispé l’odeur acide et molle
de ses lubrifications vaginales. Je passais ma langue avec dextérité
dans la fente humide de son sexe et me concentrais pleinement
sur son petit bouton rose gonflé de sang.
D’une voix légère et claire, elle
me demande :
- Où avez-vous appris
à faire çà ?
- Constamment je le fais.
C’est une manière de rendre hommage au lieu qui m’a vu
naître ...
Puis je me relevais. Avec délicatesse,
je lui fis faire un demi-tour sur elle-même, et je pus admirer
l’étrange conception de sa chair féminine. Au-dessus
du fessier, à la hauteur du creux des reins, l’on pouvait
observer une touffe épaisse de poils. J’écartais
délicatement cette zone unique, et vis un deuxième
sexe comportant une autre fente, des lèvres plus larges
et au milieu des lèvres, un sexe d’enfant de quatre à
cinq centimètres de long, en position repos. Il s’agissait
du second clitoris, volumineux cette fois et totalement adapté
à la langue et aux muqueuses internes de l’homme. Je m’efforçais
de lui faire une sorte de fellation délicate et subtile,
lapant doucement cette zone sensible. Ses ailes se mirent à
frémir et je l’entendis de sa voix cristalline gémir
avec plaisir.
- Oui, encore, bien lentement.
Oui, oui, que j’aime ! ...
Cette délicate caresse dura pendant un
long moment, puis la sachant sur le point de jouir, je décidais
de pénétrer cette touffe noir chargée de
muqueuses et d’odeurs vaginales Mon sexe toujours en érection
se glissa aisément dans cette ouverture secrète.
Le pénis y était emprisonné comme dans une
cachette sûre et délicieuse. Je sentis monter en
moi la sève de l’orgasme, je décidais de l’accompagner
en saccadant de manière plus forte le coulissement intime,
je poussais des petits soupirs qui se mêlaient à
des grognements légers. Ne pouvant plus me retenir, je
laissais exploser mon pénis dans sa chair en feu et donnais
de violentes saccades de sperme dans le bas de ses reins. L’éblouissement
était total, et je perdis connaissance sous l’effet de
la jouissance dévastatrice. Quand j’ouvris les yeux, la
femme-insecte avait disparu. Je regagnai mon lit pour m’y réveiller
quelques heures plus tard.
...
Sénèque Phèdre (1993)
Explications : Traduction
de la fameuse pièce de théatre de Sénèque
en vers blancs, c'est-à-dire sans rime mais respectant
la rythmique de l'alexandrin moderne.
Extraits de la pièce :
PHEDRE
Mon
amour trouvera
Peut-être grâce devant lui ?
OENONE
Il
a été
Sans nulle pitié pour la plus chaste des épouses.
Antiope l'Amazone a trop éprouvé
La rigueur de sa main cruelle. En supposant
Que vous puissiez fléchir votre époux irrité,
Comment pourriez-vous fléchir le coeur insensible
De son fils ? Il hait tout notre sexe, le seul nom
De femme, l'effarouche ; cruel envers lui-même,
Il s'est voué au célibat perpétuel,
Il a fui le mariage, vous savez d'ailleurs
Qu'il est fils d'une Amazone.
PHEDRE
Ah
! je veux le suivre
Dans sa course rapide au sommet des collines
Neigeuses ! Oui, à travers les roches hérissées
Qu'il foule en courant, je veux le suivre au profond
Des bois épais et sur la crête des montagnes.
OENONE
Croyez-vous qu'il s'arrête, ou mieux qu'il
s'abandonne
A vos caresses, qu'il délaisse son chaste habit
Pour favoriser de condamnables amours ?
Pensez-vous qu'il dépose sa haine à vos pieds
Lorsque c'est pour vous seule qu'il hait toutes les femmes ?
PHEDRE
Mais serait-il possible de pouvoir l'attendrir
Par de douces prières ?
OENONE
Son
coeur est trop farouche.
...
Euripide Andromaque (1994)
Explications : Célèbre
pièce d'Euripide traduite en alexandrins blancs. Version
originelle sur laquelle Jean Racine s'est appuyée pour
composée son Andromaque.
Extraits :
ANDROMAQUE
Ornement de la terre d'Asie, ville de Thèbes
D'où je partis jadis avec dot opulente
Pour venir au foyer du roi Priam, donnée
En épouse à Hector, moi, Andromaque, hier
Digne d'envie, maintenant il n'est point de femme
Plus malheureuse que moi, il n'y en aura
Jamais ; car j'ai vu mourir Hector mon époux
Par la main d'Achille. Le fils que je lui avais
Enfanté, Astyanax fut précipité
Du haut d'une tour quand les Grecs du sol de Troie
Se furent rendus maîtres ; et moi-même, issue
D'une noble famille, j'ai été envoyée
Esclave en Grèce et donnée à Néoptolème
L'insulaire comme prix de guerre comme sa part
Des dépouilles de Troie. J'habite les champs proches
De cet Etat de Phthie et de la ville de
Pharsale, là où Thétis, divinité
marine,
Vécut avec Pelée, éloignée du commerce
Des hommes et en souvenir de son hyménée
Le peuple Thessalien appelle ce lieu
Thétidée.
Là, ce palais est au fils d'Achille,
Pourtant il laisse Pelée régner sur la terre
De Pharsale, il ne veut pas reprendre le spectre
A ce vieillard tant qu'il vit. Et pour moi, unie
Au fils d'Achille, mon maître, je lui, dans ce palais
Ai fait un enfant mâle. Même dans le malheur
Où j'étais plongée, toujours cependant
je me
Flattais de l'espoir que, mon fils encore vivant,
Je trouverais une consolation et
Un appui en lui ;
...
Extraits :
Euripide Iphigénie (1994)
Arguments et explications : Pièce
du répertoire d'Euripide traduite également en alexandrins
blancs. Le sacrifice d'Iphigénie y est remarquable.
IPHIGENIE
O mon père, si j'avais l'éloquence
D'Orphée, la magie persuasive de ses chants
Pour forcer les rochers à me suivre et charmer
Les coeurs par mes discours, je saurais employer
Ces sortilèges ; hélas, je n'ai d'autre artifice
A t'offrir que mes larmes ; c'est là ma seule ressource
;
Et le rameau que ma main suppliante enlace
A tes genoux, c'est ce corps que ma mère a mis
Au monde pour toi ; non, ne me fais pas mourir
Avant le temps, il est doux de voir la lumière ;
Ne me force pas de visiter la région
Souterraine des morts. La première, je t'ai
Nommé mon père, et toi tu m'as nommée ta
fille ;
Et la première, abandonnée sur tes genoux,
Je te donnai, et reçus de tendres caresses
De toi. Tu me disais alors : "Mais te verrai-je,
Ma fille, dans la maison d'un heureux époux vivre
Florissante, comme il est digne de toi ?" alors
Je répondais, suspendue à ton cou, pressant
Ton menton, que ma main touche encore : "Et moi, père,
Que ferai-je ? Lorsque tu seras vieux, à mon tour,
Te recevrai-je, pour te rendre les tendres soins
Qui ont nourri mon enfance ?"
De ces propos, moi,
Je garde la mémoire ; toi, tu n'y songes plus,
Et tu veux me tuer ! Par Pélops, par Atrée,
Ton père, ah ! n'en fais rien ; par ma mère qui
après
M'avoir enfantée dans la douleur, pour moi souffre
Une seconde fois les douleurs de naissance.
Qu'ai-je de commun avec l'hymen de Pâris
Et d'Hélène ? Mais d'où est-il venu pour
ma perte ?
Mon père, tourne les yeux sur moi, accorde-moi
Un regard, un baiser pour qu'en mourant j'emporte
Du moins de toi ce gage, si tu restes inflexible
A mes prières.
Extraits suite --->
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